Comment la pilule abortive bouleverse les politiques et la pratique de l’avortement
NEW YORK, 12 Janvier (C-Fam) Depuis l’aube mouvement pour l’avortement, les activistes maintenaient que l’avortement ne devait concerner que la femme et son médecin. Mais dès lors que la méthode d’avortement a basculé à l’échelle mondiale de l’intervention chirurgicale à la prise de médicament, les partisans de l’avortement considèrent de plus en plus le médecin comme inutile – et dans certains cas, contre-productif.
“Le cadre classique du plaidoyer pour le droit à l’avortement dans lequel sans danger signifie légal et illégal signifie dangereux, est complètement chamboulé par l’avortement médicamenteux auto-administré“ selon les représentants d’une organisation néerlandaise qui procure des pilules abortives à des femmes dans des pays où la pratique est illégale. Ils ajoutent que “ironiquement, dans un contexte légal restrictif, l’avortement par prise de médicament est en réalité mieux contrôlé par les femmes que dans des contextes où l’avortement médicamenteux est fait sous l’égide du système de santé officiel.“
Ces remarques ont été publiées dans un numéro spécial de la revue Contraception consacré à l’avortement médicamenteux, dont l’orientation politique est illustrée par un éditorial principal de Marge Berer, la directrice d’un groupe de promotion de l’avortement basé au Royaume-Uni.
Des pays longtemps considérés comme ayant des lois progressistes sur l’avortement deviennent de plus en plus l’objet de critiques de la part des mêmes groupes féministes qui avaient l’habitude de les couvrir d’éloges. Des décennies d’efforts visant à intégrer solidement l’avortement dans les systèmes de santé étatiques, comme c’est le cas au Royaume-Uni, ont eu pour résultat que sa pratique est soumise aux mêmes contraintes bureaucratiques et règlementaires que toute autre procédure. Un article a été consacré à l’étude de femmes ayant eu recours à des médicaments abortifs illégaux en Grande Bretagne, alors qu’il existe des services légaux. Les raisons le plus souvent invoquées pour cela étaient les délais qui s’étaient généralisés quand on recourait à un système de santé surchargé.
En 2000, Berer publiait un éditorial dans le Bulletin de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) dans lequel elle argumentait que “rendre l’avortement légal est une condition préalable essentielle pour le rendre sans danger.“ En 2017, sa position a complètement basculé de la légalisation à la totale dépénalisation, ou encore le retrait de la moindre règlementation légale: “Ce qui rend l’avortement sans danger est simple et irréfutable – c’est quand il est disponible à la demande de toute femme et qu’il est universellement proposé à prix abordable et facile d’accès.“
Pour rendre l’avortement économique et accessible – quelle que soit la loi – il faut que les médicaments nécessaires pour le réaliser: le misoprostol, soit seul, soit combiné à la mifépristone, soient largement disponibles. Ces deux médicaments ont été ajoutés en 2005 à la liste des médicaments essentiels de l’OMS, mais avec la mise en garde “là où une loi nationale le permet et là où cela est culturellement acceptable.“ Un article sur l’avortement avec le misoprostol dans les pays africains francophones du Bénin et du Burkina Faso notait que le médicament avait ajouté aux listes des médicaments nationaux essentiels respectivement en 2013 et 2014. Les auteurs ont crédité l’augmentation de leur disponibilité tout en notant que cet ajout était “destiné à d’autres indications en santé reproductive, et non en vue de provoquer des avortements.“
Plusieurs auteurs dans ce numéro spécial ont abordé le sujet prospectif d’avortements pendant le premier trimestre (de grossesse) devenant entièrement médicamenteux plutôt que chirurgicaux. Certains ont exprimé la crainte que cette tendance puisse entraîner la raréfaction de prestataires formés pour pratiquer les avortements chirurgicaux – alors même qu’il existe déjà une insuffisante augmentation du nombre de prestataires à cause de l’opprobre et l’objection de conscience.
Tout comme l’avortement médicamenteux a changé le débat international sur “l’innocuité“, il a aussi mis en question le concept de “prestataires“, en mettant de plus en plus les femmes dans le rôle à la fois du patient et de l’avorteur. Dans son éditorial principal, Berer reconnaît que l’avortement médicamenteux n’est pas “ni sans poser problème, ni parfait“, mais elle blâme les expériences malheureuses des femmes confrontées aux lois anti-avortement et aux croyances: “Tout cela n’est pas la faute des pilules, même si ce sont les pilules qui sont souvent blâmées.“
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