Une réunion du conseil d’administration du Fonds des Nations Unies pour la population est assombrie par la mort subite du directeur exécutif du Fonds

By Rebecca Oas, Ph.D. | June 9, 2017

NEW YORK, le 8 juin (C-Fam) Lundi, alors que les pays se réunissaient pour examiner le nouveau plan stratégique du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), on a appris que le directeur exécutif du Fonds était mort subitement la veille au soir. Les représentants des pays ont précipitamment mis en sourdine leurs critiques pour lui rendre hommage et présenter leurs condoléances.

Babatunde Osotimehin, médecin et père de cinq enfants, avait été ministre de la Santé dans son pays natal, le Nigeria. Selon un communiqué de presse du FNUAP, son projet pour le Fonds passait par trois grands objectifs : mettre fin aux décès maternels qui peuvent être évités, répondre à tous les « besoins non satisfaits » en matière de planification familiale et mettre fin aux pratiques nuisibles pour les femmes et les filles, comme les mutilations génitales féminines ou les mariages d’enfants.

Mardi, la réunion annuelle du conseil d’administration du FNUAP s’est ouverte avec un jour de retard par des déclarations d’États et de groupes régionaux portant sur le décès de M. Osotimehin et sur le nouveau plan stratégique, qui intègre les trois objectifs prioritaires que le directeur exécutif avait fixés.

Par rapport à certaines réunions précédentes, les pressions exercées pour que le FNUAP favorise l’avortement et les « droits sexuels » ont été moins fortes. Dans sa déclaration écrite, la Suède a souhaité une analyse plus approfondie sur la « protection des droits de la communauté LGBTQI » et « des efforts du FNUAP pour améliorer l’accès à l’avortement médicalisé et aux soins après avortement » conformément aux engagements internationaux.

Toutefois, l’ambassadeur adjoint de Suède n’a pas évoqué ces éléments à l’oral, préférant déclarer que son pays « se félicitait de la participation du FNUAP à la campagne “Elle décide” », qui a été lancée par les Pays-Bas pour contrebalancer la politique américaine visant à empêcher le financement des mouvements de défense de l’avortement.

Les États-Unis ont brièvement évoqué la décision du gouvernement Trump de cesser de financer le FNUAP en mentionnant la collaboration constante du Fonds avec le bureau chinois de la planification familiale, tristement célèbre pour sa politique de l’enfant unique, de nature coercitive.

Le docteur Natalia Kanem, directrice exécutive du FNUAP par intérim, a prononcé une déclaration dans laquelle elle a résumé les travaux et la mission du Fonds. Elle a répété à plusieurs reprises que « la santé sexuelle et procréative et les droits liés à la reproduction » étaient menacés et a cité la campagne « Elle décide » comme exemple d’« engagement renouvelé » face à la réaction négative des forces conservatrices.

Mme Kanem a estimé que, pour « répondre aux besoins de toutes les femmes en contraceptifs modernes », il faudrait 3,5 milliards de dollars supplémentaires par rapport au budget actuel. Néanmoins, pour considérer que les femmes ayant des « besoins non satisfaits » veulent des contraceptifs et « n’en obtiennent pas », il faut ignorer que la plupart des femmes dont on affirme qu’elles ont un « besoin » peuvent bénéficier de contraceptifs mais choisissent de ne pas en utiliser. Pour faire disparaître complètement les « besoins non satisfaits » tels qu’ils sont définis, il faudrait convaincre des millions de femmes de ne pas tenir compte de leurs préoccupations concernant les risques sanitaires et les effets secondaires des contraceptifs ou d’agir en opposition avec leurs croyances religieuses.

En présentant le nouveau plan stratégique pour 2018-2022, Mme Kanem a également évoqué l’objectif visant à mettre fin aux décès maternels qui peuvent être évités en citant l’exemple des Maldives, où l’ONU estime que la mortalité maternelle a chuté de 90 % au cours des vingt-cinq dernières années, « diminution la plus importante au monde sur cette période ».

Mme Kanem a omis de préciser que les contraceptifs n’ont guère de rapports avec la baisse des décès maternels. Aux Maldives, la prévalence contraceptive reste relativement faible : chez les femmes mariées, elle est passée de 29 % en 1991 à 42 % en 2015, un chiffre bien inférieur à la moyenne mondiale (63,6 %).

Selon certains esprits critiques, le cas des Maldives montre que le FNUAP devrait cesser de faire preuve de myopie en s’intéressant aux contraceptifs et examiner les facteurs qui ont permis de sauver la vie des femmes dans ce pays : la formation d’accoucheuses compétentes et la mise à disposition de services d’obstétrique d’urgence pour tous. Malgré cela, le Fonds continue de mesurer les progrès accomplis en matière de planification familiale à partir des « décès maternels évités ».

Le FNUAP a annoncé que Mme Kanem exercerait les fonctions de directeur exécutif par intérim jusqu’à ce qu’un successeur soit officiellement désigné.