ONU Femmes adopte une position neutre sur la criminalisation de la prostitution

By Rebecca Oas, Ph.D. | November 22, 2019

WASHINGTON, D.C., 22 novembre (C-Fam) L’agence des Nations Unies pour les femmes a récemment annoncé sa neutralité quant à l’incrimination éventuelle de la prostitution. L’annonce a été faite en réponse à une lettre signée par plus de 1 400 représentants de la société civile critiquant sa position apparente en faveur de la décriminalisation au cours des dernières années.

Les signataires de la lettre, fournis par la publication de presse indépendante PassBlue, ont souligné que, au mépris du droit international, plusieurs agences financées par les États membres de l’ONU encouragent déjà le «travail du sexe» et militent pour sa décriminalisation. Parmi eux figurent le Fonds des Nations Unies pour la population, l’Organisation internationale du Travail et le Programme des Nations Unies pour le développement.

«Les États membres ne doivent pas laisser ONU Femmes faire de même», ont écrit les auteurs de la lettre.

L’ONU-SIDA, une agence conjointe coparrainée par plusieurs agences des Nations Unies, dont ONU Femmes, figurait également sur la liste. Parmi les entités des Nations Unies favorables à la décriminalisation de la prostitution, l’ONU-SIDA a adopté la position la plus franche, se basant sur l’argument controversé selon lequel «la décriminalisation du travail du sexe est essentielle pour changer le cours de l’épidémie de VIH chez les travailleurs du sexe et dans l’ensemble du pays».

Phumzile Mlambo-Ngcuka, directrice exécutive d’ONU Femmes, a réagi en déclarant la neutralité de l’agence sur la question. «ONU Femmes ne prend pas position pour ou contre la décriminalisation / légalisation de la prostitution / du travail du sexe», a-t-elle écrit dans une lettre de réponse, également fournie par PassBlue.

Les détracteurs d’ONU Femmes ont exprimé leur préoccupation devant le fait que les groupes de la société civile consultés avant l’examen des vingt-cinq années de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing de 1995 présentaient de manière disproportionnée des organisations cherchant à légitimer le «travail du sexe», un terme qu’ils rejetaient vivement. Les signataires, dont beaucoup sont originaires des pays du Sud, ont également critiqué la surreprésentation de candidats des États-Unis et d’autres pays anglophones.

Un grand nombre des leaders – et une grande partie du financement – du mouvement en faveur de la normalisation de la prostitution proviennent de pays riches, bien que les stratégies nationales diffèrent. Certains, comme les Pays-Bas, tentent de légaliser et de réglementer le commerce du sexe. D’autres, comme la Nouvelle-Zélande, ont opté pour une décriminalisation complète. Amnesty International et le philanthrope George Soros défendent cette position.

Parmi les défenseurs des droits des femmes, les opinions sont profondément divisées. Certains s’opposent à l’utilisation de lois pour imposer une norme morale en matière de rapports sexuels consensuels, tandis que d’autres se concentrent sur le lien étroit qui existe entre la prostitution et le trafic sexuel. Comme l’a souligné Barbara Crossette, journaliste de PassBlue, «il serait peu probable que celles qui sont pris au piège dans des bordels dans les taudis de Mumbai ou dans des villes des pays développés se qualifient eux-mêmes de travailleuses du sexe.”

Beaucoup de ceux vendus pour le sexe dans les pays développés ont été importés d’autres pays plus pauvres. Mais le commerce du sexe est également éprouvant et déshumanisant pour les personnes nées dans le pays qui se prostituent. La militante irlandaise et survivante de la prostitution, Rachel Moran, a racontésa propre histoire lors d’un événement parallèle à l’ONU co-sponsorisé par C-Fam. Elle a vivement critiqué la position récemment annoncée par Amnesty International en faveur de la décriminalisation et a réfuté l’idée selon laquelle légitimer le «travail du sexe» est une bonne chose pour les femmes: «Cela n’a pas de sens de dire qu’une personne peut être autonomisée en permettant à son corps d’être aussi ouvert au public comme un train ou une station de bus. ”

Le mouvement prudent d’ONU Femmes vers la neutralité est loin d’être une condamnation totale du commerce du sexe que ses détracteurs désirent. Cela représente une ligne de démarcation entre elle et les autres agences des Nations Unies, y compris l’ONU-SIDA, loin d’être neutre, qui compte ONU Femmes comme sponsor et soutient la décriminalisation. Il reste à voir si la position d’ONU Femmes a des implications pour ces autres agences et programmes